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Réflexion(s)

(re)Lire la presse

À L’heure des réseaux sociaux et des médias en continu, lire la presse peut sembler anachronique. Imprimés en grand format sur du papier qui salit les mains, les journaux ne sont que quotidiens et donc forcément jamais à la page. Mais quand on les compare aux deux cents caractères des tweets ou aux légendes des photos sur Snapchat, les journaux permettent de prendre de la hauteur et de creuser les sujets.

D’ailleurs il s’agit d’une évolution intéressante, quand on sait qu’il y a moins de trente ans la presse quotidienne était vue comme un support assez superficiel, ne permettant que de rendre compte que des événements, l’analyse en profondeur étant le domaine réservé du livre. C’était quand pour un journal, le destin final consistait à emballer du poisson.

En devenant électronique et donc continue, la communication ne nous a pas libérés que de la contrainte du temps, elle nous a également libérés de la contrainte d’espace. Sur un blog ou sur un site web, on peut écrire en faisant abstraction de la notion de page et même de volume. La page web nous fait revenir au temps du rouleau de parchemin ou de papier, comme celui qu’utilisa Jack Kerouac pour écrire son fameux Sur la route (1957). La page web permet de se répandre et de déborder à l’envi.

Manuscrit de Sur la route de Jack Kerouac

Parce que dans un journal la place est comptée, il faut choisir. C’est le métier du rédacteur en chef qui doit en permanence peser le pour et le contre pour définir la ligne éditoriale de son journal. C’est aussi le métier du journaliste qui doit respecter la contrainte de volume s’il veut voir son papier publié. À l’heure de la surabondance d’informations, il s’agit de vraies prouesses.

Choisissez un journal et n’en lisez qu’un mais lisez-le en entier tous les jours

Raymond Aron

Techniquement, il est possible de s’informer soi-même en temps réel mais comme personne n’y arrive réellement, on s’en remet en réalité aux algorithmes affinitaires des réseaux sociaux dont la finalité est publicitaire, ce qui biaise forcément les choses.

C’est ici que le conseil que Raymond Aron donnait à ses étudiants prend tout son sens. Lire la presse ne permet pas seulement de s’informer de manière pratique (avec l’habitude, lire un journal peut se faire assez rapidement, surtout en PDF), c’est aussi — et surtout — une façon de se laisser surprendre par les choix de la rédaction. Une façon de se poser des questions.

En un mot une façon de réfléchir. Et donc une façon de s’occuper utilement en confinement.

À demain, 21 heures

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