L’Hérétique est le bateau qu’Alain Bombard a utilisé en 1952 pour traverser l’Atlantique, ce qui, à l’époque, a constitué une véritable provocation. Le nom de son bateau symbolisait à lui seul tout le projet de Bombard : ramer à contre-courant — littéralement — pour faire surgir sa vérité à la face du monde.
En démontrant qu’on pouvait survivre à un naufrage, Alain Bombard a révolutionné le sauvetage en mer et a contribué au développement des loisirs nautiques. Alain Bombard a raconté cette aventure dans un livre paru en 1953, Naufragé volontaire.
Or, ce qui est hérétique dans cette aventure, ce n’est pas tant l’exploit que la méthode. La vérité, en effet, est le fruit d’un consensus. Ce qui est vrai est reconnu comme tel par le plus grand nombre. Ou, pour le dire de manière plus algorithmique, quelque chose est vrai tant que la majorité s’accorde sur ce point. Avec une telle définition, ce qui est vrai ici et maintenant (hic et nunc, comme disent les latinistes) peut naturellement changer. Et si Alain Bombard a tant marqué les esprits c’est parce, justement, il a réussi seul contre l’avis de tous.
C’est aussi parce qu’elle manifeste un consensus que la démocratie peut être vue comme une vérité et d’une certaine manière, la démocratie peut également être vue comme un optimum à un moment donné. Il ne s’agit pas, cependant, de savoir si ce système politique est bon ou pas, comme le dit Churchill mais de se dire que le vote entérine un consensus. L’élu désigné par un vote n’est ni le meilleur ni le pire, c’est juste celui qui a su cristalliser un consensus à un moment donné.
Le consensus n’est pas — et de loin — la méthode de gouvernance la plus efficace. Il y a dans le consensus un petit côté esthétique. Le consensus est une solution satisfaisante pour l’esprit.
De la même façon, les hérétiques sont des esthètes de la démonstration. Ils n’y arrivent pas souvent, mais quand ils y arrivent ça a de la gueule et c’est ce qui les rend fascinants.
À demain, 21 heures